6 janvier 2015

In Love : premiers extraits

Pour le lancement de la collection In Love (dont le nom parle de lui-même), nous avons décidé, avec Charlotte Bousquet (Ce feu qui me consume) et Camille Brissot (Le vent te prendra), de te proposer des extraits, histoire de patienter jusqu'au 18 mars. 

Aujourd'hui : la rencontre.


Un regard circulaire lui apprit que personne n'avait poussé le zèle jusqu'à visiter ces ruines sous un soleil de plomb.

Rassuré, Arslan revint à son second endroit préféré du site : l'hippodrome.

Il n'en subsistait que des gradins et une piste que la marée, quoique de faible amplitude, envahissait régulièrement. L'eau traçait des zones de différentes couleurs qui allaient du bleu pur au jaune pâle.

L'adolescent vérifia de nouveau que nul ne pouvait le voir. Une seconde, il regretta d'être seul. En même temps, il se réjouissait de pouvoir profiter du site à sa guise.

Alors, il s'élança sur la piste de l'hippodrome, soulevant des gerbes d'eau salées, voulant goûter une dernière fois à ce petit plaisir rituel qu'il s'offrait en arrivant à Césarée.

Quand il était enfant, il avait beaucoup joué à refaire la course de chars de Ben-Hur. Il connaissait la scène par cœur : les chevaux blancs du héros, l'attelage noir de Messala. Les couleurs bleues du premier et celles, rouges, du second.

Il mimait aussi les autres personnages à tour de rôle. Celui qui versait sur le côté et qui évitait de peu d'être piétiné par ses concurrents. Le légionnaire qui était emporté par le véhicule qui frôlait le mur de trop près. Il les connaissait tous !

Essoufflé, il sentit soudain ses jambes endolories d'avoir lutté contre la résistance de l'eau. Un point de côté le tenaillait également et il était trempé des pieds à la tête.

Il n'avait plus l'âge de ces bêtises.

Tandis qu'il se redressait, il aperçut un halo clair sur les marches de pierre qui dominaient son terrain de jeu. Pendant qu'il courait à perdre haleine, quelqu'un était arrivé. Son malaise grandit quand il remarqua que la personne qui l'observait était une jeune fille.

Elle ne devait pas avoir plus de seize ans. Mais il distinguait mal son visage à contre-jour. Jolie ? Impossible de le savoir. En tout cas, ses cheveux étaient noirs comme la nuit et prenaient des reflets violets sous la brûlure du soleil.

L'inconnue portait une longue robe blanche qui dévoilait ses bras et ses chevilles pâles. Il l'observa sans pouvoir en détacher ses yeux et se sentit devenir écarlate.

Il ne manquait plus qu'un détail pour que son humiliation soit complète : qu'elle soit jolie. Alors, il se figea et lui rendit son regard, attendant qu'elle bouge enfin.

Ils se dévisagèrent longtemps. Et seul le bruit des vagues, si lointain maintenant, meubla le silence.
Finalement, lassée ou amusée, la jeune fille se détourna et ses traits apparurent en pleine lumière. Arslan sentit son ventre se nouer.

La jeune fille n'était pas jolie, non.

C'était bien pire : elle était belle avec ses lèvres pleines, ses pommettes hautes et douces, ses yeux bien dessinés et son front serein.

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