27 mars 2013

Le joueur d'échecs

Il y a quelques jours est sortie chez Étonnants Classiques une nouvelle édition du Joueur d'échecs de Stefan Zweig. Il se trouve que j'ai travaillé sur la présentation et le dossier de ce classique du XXe siècle.

Il faut savoir que cette nouvelle est posthume, Zweig l'ayant rédigée quelques mois avant de se suicider au Brésil avec sa seconde femme, persuadé (on est en 1942) que les Nazis allaient l'emporter. D'où une tonalité sombre.

Sur un paquebot, le narrateur rencontre un champion d'échecs assez frustre et, moyennant finances, parvient à engager une partie avec lui. Au moment où il va tomber dans un piège tendu par son adversaire, il est sauvé par l'intervention d'un mystérieux homme qui s'avère seul capable de mettre en difficulté le maître d'échecs...

En relisant ce texte, j'ai retrouvé le plaisir de lecture que procure le style fluide et précis de Zweig. Son histoire est bien entendu une métaphore de l'affrontement entre civilisation et barbarie, mais les interprétations restent ouvertes tant le texte est riche sous une apparence de simplicité. 

La vie de Zweig, faite de voyages, de fuites, de biographies, est passionnante. Je suis aussi content d'avoir pu intégrer dans le cahier photos des représentations tirées de The Wire, d'un court-métrage de Pixar et du Septième Sceau de Bergman afin de présenter les métamorphoses du joueur d'échecs. Et puis, dernier point, je trouve la couverture de Laurent Rivelaygue très réussie.

1 commentaire:

herlequin94 a dit…

On ne parlera jamais assez de Zweig. Et la richesse du Joueur d'Échecs, comme le signale Fabien, réside effectivement dans la multiplicité de ses lectures possibles.
Personnellement, l'opposition Civilisation/Barbarie n'est pas ce qui m'a le plus marqué ici: peut-être parce que l'intelligence psychologique de Zweig outrepasse à son sens cette trivialité.
Ce qui me fascine ici, c'est le message sous-jacent: pour survivre (et l'emporter dans le cadre de la partie), ce n'est pas l'intelligence qui l'emporte, mais l'adaptabilité, cette capacité qu'ont certains d'entre nous d'analyser instinctivement la situation pour en tirer profit. Les deux protagonistes de l'histoire en use ici, de façon différente, l'un pour survivre, l'autre pour gagner. À travers ses personnages, Zweig fait le constat de son incapacité à s'adapter à ce monde nouveau — et j'encourage tout le monde à lire "Le Monde d'Hier" pour bien comprendre à quel point Zweig savait qu'il n'appartenait plus au monde en 1942 — et à la formidable (et inquiétante) adaptabilité de la barbarie (le nazisme, bien entendu, mais le communisme également).
Mais, comme le dit Fabien, tout le monde y trouvera quelque chose...